- Les aides au revenu agricole , malgré les montants concernés (~ 7,5 Mds €/an
pour les principales aides au revenu PAC, voir ci-dessous), ne permettent pas à la
majorité des exploitants d'avoir une rémunération de 20 000 € net/an en 2016 (aides comprises), alors que plus de 25% des exploitants des
moyennes et grandes exploitations (et la grande majorité des petits
exploitants) ont des revenus inférieurs
à 5000 € net/an depuis 2013, dans la plupart des types
d’élevages et de cultures, à l’exception de la viticulture et d’une partie des
grandes cultures.
Principales
modalités / conditions
|
Coût/avantage
par an (et /ha,
animal, exploit)
|
Dépense
publique /an (2016)
|
Principaux
« résultats »
|
Evaluations de
l’efficacité / efficience
|
Impacts
éco / sociaux
|
|
Les aides « découplées » ne sont pas liées à la production
mais sur les aides reçues en 2000-2002 (DPU puis DPB)
|
Aides
à l’hectare pour toute exploitation « active » respectant des
conditions environnementales de base
|
~ 6,2
Mds €
|
370 000 bénéficiaires
25 M d’hectares ?
|
-
/ - -
|
+
/ - -
|
|
Les aides
« couplées » sont
liées à la production de l’année en cours et sont différentes selon le type
d’exploitation.
|
Vaches allaitantes
Prime à la brebis
…
|
65 à 167 €/vache
+ou- 20 € /brebis
…
|
~ 1,2 Mds €
|
3,8 M
vaches
7 M ovins
…
|
?
|
+
/ -
|
- Ces revenus sont en déclin progressif depuis 10 ans
pour la plupart des élevages (et
notamment depuis 2014 pour les élevages de vaches laitières), alors que les exploitations porcines et à
dominante céréalière ont des revenus davantage fluctuants (avec des
rémunérations trois fois plus élevées en 2010-2012 pour les céréales)
|
- Les variations de revenus entre types
d’exploitations sont fortes et très sensibles aux cours de certains produits « stratégiques » : par
exemple, une hausse de 50% du prix des aliments du bétail réduit en moyenne de
13 000 € le revenu d’une exploitation « moyenne » de bovins-lait qui
est composée d’environ 2 plein temps dont le revenu total est en 2012 de
37 000 € après cotisations sociales (Rica p.24-25).
Le revenu net moyen d’un éleveur laitier passe donc de 18 000 € à
12 000 € net/an suite à cette hausse des prix.
- Pourtant,
les aides à l’agriculture profitent principalement à une minorité de grands
exploitants (20% concentrent 47% des
aides à la production en 2006 et
plus de 52% en 2015),
alors que les revenus de ces grands exploitants
sont toujours très élevés et ne
s’ajustent pas selon les variations de prix parfois très élevées, avec des
rémunérations qui peuvent être négatives pour plus de 25% des exploitants dans
les années les plus difficiles et dépasser 80 000€
net/an pour la majorité des exploitants de grandes cultures dans les phases de prix
élevés (jusqu’à 200 000 € net/an pour certains, Synthèse
p.5)
Pour les
pratiques agro-environnementales
Principales
modalités / conditions
|
Coût/avantage
par an (et /ha,
animal, exploit)
|
Dépense
publique /an (2016)
|
Principaux
« résultats »
|
Evaluations de
l’efficacité / efficience
|
Impacts
éco / sociaux
|
|
La compensation d’handicap
naturel (ICHN) soutien
le maintien de l’activité agricole en milieu difficile
|
Parcelles situées en zone à rendements limités (ex. montagne) jusqu’à 50 hectares/exploitation
|
10 000
€/ exploitation
|
~ 0,9 Md €
|
85 000
bénéficiaires (5 M d’ha)
|
+
/ +
|
+
/ +
|
Les aides aux investissements soutiennent l’installation des jeunes agriculteurs
(DJA) et la modernisation des exploitations
|
Conditions
d’âge et de maintien (installation) et de type d’investissement
(modernisation)
|
8 à
36 000 € (installation)
Très variables (modernisation)
|
~ 0,4 Md €*
|
5000
des 8000 installations aidées/an
9000
projets d’investissement/an
|
+
/ +
|
+
/ -
|
Les mesures Agro-Environ-nementales
(MAE) soutiennent diverses pratiques en
compensant leur surcoût
|
Prime à l’herbe (PHAE)
Conversion Agriculture Bio (CAB)
Autres MAE
|
80 €/ha
100 à 800 €/ha
Variable
|
~ 0,4 Md €*
~ 0,2 Md €
~ 0,1
Md €
~ 0,1
Md €
|
~60 000
bénéficiaires
~7 000 bénéficiaires
~40
000 bénéficiaires
|
- / +
|
+
+ / +
|
- Les
politiques agro-environnementales sont très loin d’avoir atteint leurs
objectifs d’amélioration des pratiques agricoles :
- Les surfaces en agriculture biologique n’atteignent que 6,6% en 2017 (1,8 M d’hectares certifiés ou en conversion) contre 20% attendus en 2020 (objectif révisé à la baisse depuis le Grenelle à 15% en 2022, PAP 2018). En pourcentage de la Surface Agricole Utile, la France n’est qu’à la 21ème place au niveau européen. Cette augmentation nettement moins rapide que prévue de la production ne permettant pas de répondre à la forte hausse de la demande de produits bio, ce qui entraine une augmentation des importations (à 2,7 Mds € sur 8,4 Mds € en 2017, agence bio).
- L’utilisation des pesticides est stable depuis 2008 (en nombre de doses) alors que l’objectif était une réduction de 50%. En volumes totaux (tonnes), leur utilisation a même augmenté de plus de 20% sur la période. De plus, au moins 23 substances phytosanitaires sont encore approuvées en France et représentent plus de 40% des tonnages utilisés (27 000 tonnes en 2016) alors qu’elles ont été identifiées comme dangereuses par plusieurs expertises collectives d’études scientifiques (Rapport phyto).
o
Les surfaces non bio mais « extensives » en termes d’utilisation d’engrais et de produits
chimiques sont tout de même supérieures
d’au moins 7 M d’hectares concernées par les autres mesures
agro-environnementales (Eval
PDRH 1), soit environ
25% de la surface agricole utile ;
o
les soutiens aux économies énergétiques des
agriculteurs n’ont pas eu d’impacts significatifs (Eval
PPE), d’autant plus qu’ils sont
plus de 10 fois inférieurs au taux réduit de
taxes sur les carburants (Eval
IGF 2011, voir tableau ci-dessous)
Principales
modalités / conditions
|
Coût/avantage
par an (et /ha,
animal, exploit)
|
Dépense
publique /an (2016)
|
Principaux
« résultats »
|
Evaluations de
l’efficacité / efficience
|
Impacts
éco / sociaux
|
|
La réduction de taxe sur le
fioul-carburant permet de limiter
le coût du gazole pour les activités agricoles
|
Le
gazole non routier n’est taxé qu’à hauteur d’environ 0,2 euros/litre contre
0,6 euros/litre en 2018
|
0,4
euros/litre
|
~ 0,9 Md €
|
2,2 M
de tonnes de gazole non routier (42%
du total)
|
- /
- -
|
- - / -
|
- Les
résultats très limités des politiques agro-environnementales s’expliquent principalement
par le manque de cohérence entre les aides des 2 « piliers » de la
PAC. En effet, l’essentiel des aides
n’incitent pas aux pratiques favorables à l’environnement : moins de 1,5 Md €/an de soutiens sont
accordés aux pratiques extensives, alors que les pratiques intensives supposées
plus rentables bénéficient de la plupart des 10 Mds €/an d’aides au revenu (voir politiques agricoles). En effet, les taux
d’aide sont plus élevés pour les grandes cultures qui sont généralement très
intensives (Tableaux
Rica), alors
qu’ils sont nettement moins élevés pour les petites exploitations et les
exploitations à majorité de prairie qui sont généralement les plus extensives.
- Ainsi, les aides agro-environnementales concernent
principalement les exploitations dont les pratiques étaient déjà proches en
raison de conditions géographiques (ex. zones de montagne ou de marais) ou de
types d’élevages. Inversement, leur efficacité est limité dans les territoires
davantage concernés par une intensification des cultures et une concurrence
entre cultures et surfaces en herbes (Evaluation
PDRH 2017). Les impacts sur la biodiversité ou la qualité de l’eau
sont ainsi non significatifs lorsqu’il est possible de les évaluer et ils sont
loin de compenser les impacts négatifs croissants des activités agricoles plus
intensives.
- Par ailleurs, les soutiens proposés sont supposés
compenser les « surcoûts » liés aux pratiques extensives, mais leur montant ne prend pas en compte
l’ensemble des « coûts » liés aux changements de pratiques (Evaluation
2009 + Evaluation
2011 p.129-134) :
o
La réduction
importante de l’utilisation des produits phytosanitaires demandent des investissements en matériels et en temps de
travail qui ne sont pas couverts par les montants de ces aides, en
particulier pour remplacer des herbicides par un désherbage mécanique ou
thermique (Rapport
phyto). S’agissant des fongicides ou insecticides, les produits de
substitution (bio-contrôle) impliquent également des surcoûts, mais
représentent surtout un risque de pertes
de cultures ou de rendement qui peut être perçu comme important par les
agriculteurs ayant l’habitude d’utiliser des pesticides
o
Dans le cas des
mesures de prévention des algues
vertes en Bretagne (dont la prolifération se nourrie principalement
des excès d’engrais azotés utilisés sur les parcelles voisines des rivières
s’écoulant dans plusieurs baies), l’évaluation du plan 2010-2015 souligne que
le faible engagement des agriculteurs concernés dans de nouvelles pratiques
moins intensives s’explique principalement par les évolutions des cours des denrées agricoles et par la
faiblesse des aides au regard des investissements à réaliser pour une
modification importante des pratiques, notamment les études de parcelles et formations
à mettre en place. Pourtant, seuls des changements importants peuvent permettre
des réductions significatives des excès d’azotes, comme l’ont engagé des
exploitations de la baie de Fresnaye en particulier (ex. forte augmentation des
surfaces en herbes par les exploitations laitières concentrées à proximité des
bâtiments d’élevage, afin de mieux répartir les effluents d’élevage sur les
différentes parcelles de l’exploitation).
- Au-delà du ciblage « inversé » des aides
au regard des objectifs affichés, les
pratiques les moins intensives subissent une concurrence déloyale :
- Localement par les exploitants respectant le moins les normes sanitaires, dont les sanctions sont souvent inexistantes, y compris en zone sensibles dans lesquelles les données de production ne sont même pas transmises aux services de contrôle (Evaluation algues vertes) + utilisateurs de pesticides interdits ? ;
- Par les importations, en particulier de fruits et de viandes dont les importations augmentent principalement en raison des distorsions de concurrences sociales (salaires des ouvriers agricoles et agro-alimentaires) et environnementales (utilisation de produits chimiques dangereux moins coûteux), y compris au sein de l'UE, notamment de la part de l’Espagne (+ 0,7 Md €/an d’importations depuis 2012) ou de l’Allemagne (+ 0,5 Md €/an) ;
- L’exonération
de cotisations ciblant les travailleurs saisonniers (TO-DE) limite,
mais ne permet pas de compenser les concurrences sociales de ces pays ou de
la Pologne, mais cette exonération accroît
plutôt la précarisation des conditions d’emploi, avec une part des CDI
parmi les salariés d’exploitations ou de groupements d’employeurs qui a été
divisée par 2 depuis la période où des exonérations de cotisations étaient
conditionnées à l’embauche en « CDI » (entre 2006-2008, MSA) ;
Principales
modalités / conditions
|
Coût/avantage
par an (et /ha,
animal, exploit)
|
Dépense
publique /an (2016)
|
Principaux
« résultats »
|
Evaluations de
l’efficacité / efficience
|
Impacts
éco / sociaux
|
|
L’exonération TO-DE permet de réduire le coût des Travailleurs
Occasionnels ou Demandeurs d’emploi
|
Exonération
de cotisations patronales totale à 1,25 Smic puis dégressive jusqu’à 1,5 Smic
jusqu’à 119 jours/an
|
~4000
€/an/salarié à 1,25 Smic
|
~ 0,5 Md €
|
70 000
établissements 1,6 Md de masse salariale (sur 8 Mds)
|
- /
- -
|
+ / -
|
- En effet, la plupart des pays importateurs utilisent des doses ou substances de produits chimiques ou antibiotiques interdits pour les producteurs français, mais autorisés pour les importateurs. C’est le cas de nombreuses substances utilisées en agriculture (Tableau autorisations d’importations), alors que les pesticides autorisés pour les importateurs sont généralement plus nocifs et moins coûteux
- S’agissant des pesticides agricoles, l’interdiction des produits dangereux est généralement très longue et difficile à obtenir en raison du règlement européen 1107/2009. Celui-ci limite en effet fortement les possibilités pour les Etats de revenir sur des autorisations accordées par le passé (Rapport phyto 2017) :
o
Ces autorisations
sont accordées par la Commission Européenne si le Conseil ne se prononce pas à
la majorité qualifiée des Etats (55% représentant 65% de la population), sur la base d’études du fabricant et
sont examinées par l’Agence Européenne de Sécurité des Aliments (Efsa) ;
o
Lorsque de
nouvelles études prouvent une nocivité importante et même lorsque l’Agence
européenne des produits chimiques (Echa) la classe au titre de sa dangerosité, l’autorisation est « garantie » pour
le délai initialement prévu et ce délais est même très souvent étendu ;
o
Les examens par
les Agence européenne (et nationales pour la plupart) utilisent des « panels d’experts » dont une
partie sont rémunérés par les industriels avant, pendant ou suite à ces
examens, ce qui a été notamment le cas pour plusieurs des responsables des évaluations
de la dangerosité du glyphosate (Monsanto papers, Le
Monde 6 octobre 2017). De plus, ces examens portent sur des études des
effets de la substance active des produits et non sur l’ensemble du produit
« formulé » (incluant ses additifs « surfactant ») ;
o
Lors du réexamen,
une partie des substances considérées à risque de toxicité aigüe peuvent perdre
leur Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) dans certains Etats, mais un produit alimentaire l’ayant utilisé peut
toujours être importé dans un Etat ayant interdit la substance ;
o
Pour limiter les
distorsions et risques sanitaires des importations, les Etats peuvent interdire
en urgence l’importation de substances ou de produits en contenant suite à de
nouvelles données scientifiques, mais ces mesures doivent approuvées à la majorité
qualifiée des Etat membres et les Etats utilisent très peu ces possibilités (2
insecticides concernés seulement en France en 2012 puis en 2016),
manifestement en raison des risques de contentieux
(?) ;
o
Enfin, lorsque
des produits sont interdits dans tout l’Europe, très peu de contrôles sont réalisés sur les stocks accumulés avant
l’interdiction de vente, que certains producteurs continuent d’utiliser (source ?).
- Et pour les produits autorisés, les contrôles réalisés ne portent que sur
les doses maximales par produit, mais pas sur le cumul des doses des différents
produits, alors que les effets cumulés (« cocktail ») sur la
santé sont les plus problématiques (mais les moins étudiés encore à ce jour,
avec les expositions par voies aériennes), alors que les contrôles de la DGCCRF
révèlent que plus d’1 produit alimentaire sur 4 contient des résidus d’au moins
2 pesticides.
- Les impacts sur l’emploi des pratiques
agro-environnementales sont pourtant très supérieurs aux pratiques
« conventionnelles » :
o
La comparaison
des évolutions de l’emploi entre les exploitations converties au bio (entre 2010
et 2013) et les autres exploitations de taille et d’activité équivalente
indique que la conversion au bio
entraîne une densité en emplois de +10% à +20% pour la plupart des tailles
et types d’activités (Etude
emploi Agreste). Les écarts sont souvent les plus importants pour les
exploitations de petite taille, hormis pour la viticulture où l’intensité en
emploi augmente encore avec la taille des exploitations ;
o
Cette estimation
est même probablement un minimum dans la mesure où la plupart des exploitations
en début de conversion étudiées avaient déjà des pratiques utilisant peu
d’intrants et davantage de main d’œuvre (surtout en 2010 où les conversions en
bio concernaient davantage les agriculteurs déjà impliqués)
o
En effet, l’agriculture
biologique implique une moindre utilisation d’engrais et de produits
phytosanitaires et donc une plus grande intensité de travail, en particulier
pour réaliser les activités de désherbage mécanique ou thermique, la veille des
plantes et animaux et appliquer les traitements biologiques. Et les
exploitations de taille moyenne sont plus généralement plus intensives en
emploi, en raison d’une moindre utilisation de machines agricoles et d’économies
d’échelle moins importantes : les
exploitations de taille moyenne ont donc une densité en emploi[1] supérieure de +20% à +100% à celle des très
grandes exploitations selon les types d’activités (voir
tableaux RICA), les différences étant particulièrement élevées pour les
grandes cultures et plutôt limitées pour l’élevage bovin ;
[1] Emploi équivalent Temps plein/CA hors subventions (= Unité de Travail Agricole / Production de
l’exercice)
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