vendredi 1 septembre 2017

Evaluations des politiques de l’emploi

Dispositif
Avantage ou coût /an             
Dépense publique /an
La réduction générale de cotisations patronales permet à l’ensemble des entreprises de réduire leurs cotisations patronales de +ou- 42% en situation « normale » à +ou- 15% au niveau du Smic. Cette réduction est dégressive jusqu’à atteindre 0% à 1,6 Smic (les cotisations patronales sont donc de +ou- 24% pour 1,2 Smic, 33% pour 1,4 Smic et +ou- 42% à partir de 1,6 Smic)*
~ 4700 €/employé au Smic
~3700 € à 1,2 Smic
~2200 € à 1,4 Smic
~1000 € à 1,5 Smic
0 € à 1,6 Smic

~ 20 Mds €
en 2015
(Etat)
Principale source : PLFSS Annexe 5  
- Les évaluations de l’effet de l’allègement général des cotisations patronales ont des conclusions très variables :
o   Pour la plupart, les estimations vont de 200 000 à 800 000 emplois créés ou maintenus grâce à ce dispositif, à son niveau de 2011 (OFCE 2012 et DARES 2012).
Dans toutes les estimations, les effets sont fortement liés à la part des salariés rémunérés au niveau du Smic ou en dessous de 1,3 SMIC (de moins de 10% pour l’énergie à plus de 60% pour la restauration, Tiepp-OFCE 2012). Deux principaux types d’effets ont été estimés avec des méthodes différentes et sur des périodes variés :
·         L’effet de « substitution » entre le capital (les outils de production) et le travail devenu relativement moins coûteux ;
·         L’effet « volume » sur la hausse de la demande qui résulterait d’une baisse des prix rendue possible par la réduction du coût du travail. Cet effet est d’autant plus fort que la hausse de la demande concerne des productions nationales se substituant à des importations devenues relativement plus coûteuses.
o   Les méthodes « micro » qui sont les plus citées (IGF 2011, Tiepp-OFCE 2012) comparent généralement des entreprises bénéficiaires et non-bénéficiaires équivalentes. Or l’allègement général visant les bas salaires dans toutes les entreprises du territoire, ces méthodes ont plutôt comparé les évolutions de l’emploi avant et après la mise en œuvre de ces allègements. De ce fait, l’impact des facteurs « externes » (croissance de l’activité, autres exonérations utilisées, etc.) sont moins pris en compte. De plus, les emplois comptabilisés ne sont pas « équivalent-temps plein », ce qui peut biaiser fortement l’estimation des effets créés (dont la plupart peuvent être liés à la réduction du temps de travail ou à l’augmentation de l’utilisation de contrats courts ou à temps partiel, OFCE 2012) ;
o   Les méthodes « macro » utilisent des « modèles » plus généraux de l’économie et aboutissent à des effets toujours positif, mais plus limités. Par exemple, l’effet global de l’allègement général passe d’environ 500 000 emplois à moins de 200 000 (OFCE 2012) en prenant en compte les emplois détruits par le financement de la mesure (hausse des impôts ou baisses des dépenses publiques) et la limitation des gains de compétitivité-prix liée à une réduction équivalente du coût du travail par les pays partenaires commerciaux de la France. Ces méthodes permettent de mieux préciser la part des effets « substitution » et « volume » dans l’effet global sur l’emploi et concluent à un effet majoritaire de « substitution » de capital par du travail, ce qui implique qu’elles reposent fortement sur l’hypothèse retenue d’élasticité relative des demandes de travail et de capital. En l’occurrence, ces estimations reposent sur l’hypothèse forte qu’une baisse de 1 du coût relatif du travail non qualifié (par rapport au coût du capital) au niveau du Smic augmente de 0,9 la demande de travail (contre une élasticité moyenne de 0,3 pour l’ensemble du travail et des niveaux de salaires).
o   (IRES 2014) effets substitution travail/capital + hausse demande via baisse prix sur 2004-2011 selon taille/secteur et dynamique effectifs

o   Au-delà de leurs divergences de méthodes et de résultats, ces évaluations s’accordent sur l’analyse d’un effet principalement lié au ciblage sur les bas salaires (qui sont plus facilement remplacé par du capital et dont le niveau impact davantage les prix). En revanche, ces divers résultats ont plusieurs limites communes :
·         L’absence de confrontation avec les évolutions effectives de l’emploi au-delà du court terme (hormis IRES ?) et l’absence d’estimation de la part des emplois supplémentaires qui étaient précédemment déjà existants mais non déclarés. Cette part étant probablement importante compte tenu de l’importance du travail non déclaré dans les secteurs les plus impactés (restauration, commerce, construction, etc.) ;
·         La difficile distinction entre les effets conjugués des diverses mesures réduisant le coût du travail (dont les modalités varient très fréquemment, voir graphique ci-dessous) ;
·         La prise en compte limitée des évolutions et interactions entre secteurs. En particulier, la part des salaires proches du SMIC dans les secteurs non exposés à la concurrence internationale (ex. grande distribution) est croissante (Cour des comptes 2006 p.37-39), ce qui tend à limiter les effets de ces réductions de cotisations sur les plus bas salaires.

o   Une autre limite de ces évaluations est qu’elles semblent sous-estimer la captation à long terme des baisses de cotisations sociales, dont la décroissance correspond fortement à la hausse de la part des dividendes, alors que les investissements sont restés stables depuis 30 ans (Hussonet 2014, voir graphique ci-dessous).

o   Malgré ces fortes incertitudes sur les créations d’emploi effectivement attribuables aux réductions générales de cotisations patronales, leur efficience reste relativement positive au regard des réductions de TVA, y compris en retenant la fourchette basse des estimations d’emplois créés :
Comparaison des estimations des coûts publics par emploi des principales mesures sectorielles et générales de soutien de l’emploi

TVA réduite sur les travaux dans les logements
TVA réduite sur la restauration
Réduction générale des cotisations patronales
Emplois « nets » créés ou maintenus par le dispositif
32 000 à 34 000
6 000 à 9 000
200 000 à 800 000
Coût public brut (en euro/an)
+ou- 5 Mds
+ou- 3 Mds
+ou- 20 Mds
Coût public par emploi (en euro/an)
125 000  à 160 000
175 000 à 260 000
25 000  à 100 000
Sources : Synthèse CPO sur la TVA2015, OFCE 2012 et 2012
  • Ces comparaisons entre types de mesures restent toutefois limitées par les méthodes différentes utilisées pour estimer les « effets emploi ». La plupart de ces estimations utilisent des approches économétriques, mais avec des méthodes différentes et sur des périmètres d’emplois indirects variables. Par exemple, l’ensemble des emplois indirects sont pris en compte par les études sur les réductions de cotisation patronales, alors que seuls les emplois directs sont pris en compte par les études sur la TVA réduite sur la restauration.
  • De plus, les hypothèses sont parfois variées s’agissant de la part des dépenses publiques prises en compte. Par exemple, l’impact emploi de la réduction du taux de TVA applicable à la restauration (de 19,6% à 5,5% en 2009- 2011) est estimé entre 6000 et 9000 emplois « directs » supplémentaires par an (par 3 études différentes). Le coût net de la mesure étant d’environ 2,6 milliards d’euros par an (3,2 Mds diminué de 0,6 Mds d’euros par an de subventions directes au secteur supprimées à cette occasion), le coût par emploi créé est supérieur à 300 000 euros par emploi créé. Pour autant, l’estimation est réduite à 150 000 euro par emploi créé (dans le rapport Thévenoud), car celui-ci déduit du coût de la mesure les revalorisations salariales et la répercussion de 20% de la baisse de la TVA sur les prix. Dans tous les cas, l’efficience de cette réduction de TVA reste limitée et s’explique par une utilisation des gains centrée sur l’amélioration des revenus des indépendants et/ou des salariés du secteur et non sur la création d’emplois.

- Le Crédit d’Impôt Compétitivité Emploi (CICE)  a été mis en œuvre progressivement depuis 2013, puis complété par d’autres réductions de cotisations patronales : le « zéro charge au niveau du smic » et le passage de 5,25% à 3,45% des allocations familiales en 2015 et 2016 (ou 2,15% pour les indépendants), soit environ 8 Mds/an à partir de 2016 (qui s’ajoutent au coût croissant du CICE). Ces réductions interviennent à la suite de hausses des cotisations patronales d’environ 3 Mds d’euros/an en 2011 et 2012 (notamment l’annualisation des allègements généraux qui en a réduit la portée d’environ 2 Mds d’euros/an).

Dispositif
Avantage ou coût /an            
Dépense publique /an
Le Crédit d’Impôt Compétitivité Emploi (CICE) permet à l’ensemble des entreprises de récupérer 6% des salaires bruts ne dépassant pas 2,5 Smic annuel (soit ~ 43 500 euros pour un plein temps). Ce taux était de 4% pour 2013, 6% pour 2014, 2015 et 2016 et passe à 7% pour 2017. Cette « récupération » se fait en juin de l’année suivant le versement des rémunérations utilisées pour le calcul (ou au cours de la même année sous forme de crédit « préfinancement »).
~ 1000 €/employé au Smic
~1500 € à 1,5 Smic
~2100 € à 2 Smic
~ 2600 € à 2,5 Smic
0 € après 2,5 Smic

~ 18 Mds €
pour 2015
(payés en 2015, 2016 et 2017 par l’Etat)
Les premières évaluations du CICE, réalisées sur l’année 2014 avec diverses méthodes micro et macro-économiques (Rapport CICE 2016), concluent à des effets sur l’emploi très limités, voire quasi-nuls (0 à 80 000 emplois créés ou maintenus selon les évaluations) pour un coût pourtant très élevé d’environ 18 Mds d’euros en 2015. Malgré ce montant élevé (dont plus de la moitié n’est effectivement dépensé qu’après l’année concernée), aucun effet du CICE n’est non plus identifié sur les investissements et les exportations, du moins pour les années 2013 et 2014.
o   Comme pour les allègements généraux de cotisations, l’ensemble des entreprises du territoire ont été ciblées, ce qui ne permet pas l’application de méthodes « micro-économiques » comparant des entreprises bénéficiaires et non bénéficiaires « similaires ». Deux évaluations « micro » ont comparé des échantillons d’entreprises ayant plus ou moins bénéficié de la mesure (selon la part du CICE sur leur masse salariale et la part de la masse salariale sur leur coûts de production) avant et après sa mise en œuvre afin d’estimer si les « plus bénéficiaires » ont une meilleure évolution de leur effectif que les « moins bénéficiaires ». Les deux évaluations identifient ainsi entre 0 et 80 000 emplois supplémentaires liés à la mesure. Ces évaluations ont « contrôlé » des variables différentes et ont constitué leurs échantillons différemment, ce qui explique ces différences de résultats. Par exemple, l’estimation du Tepp (la plus haute) prend en compte davantage de variables de contrôles (ex. secteur et taille) mais exclut les entreprises de moins de 5 salariés de son échantillon. En revanche, ces méthodes n’ont pas pris en compte les recours différenciés à l’intérim ou à la sous-traitance entre entreprises, ce qui peut aboutir à sous ou sur estimer les évolutions de leurs effectifs sur plusieurs années.
o   L’évaluation micro du Liepp a été complétée par une enquête auprès d’un petit échantillon d’entreprises qui semble confirmer que ce crédit d’impôt n’a pas été utilisé pour recruter, mais qu’il a pu, dans quelques cas (dont la fréquence reste à préciser), contribuer à maintenir certains emplois menacés par des difficultés conjoncturelles. Une estimation réalisée à partir de données de la banque de France suggère de manière peu précise que « quelques dizaines de milliers d’emploi » auraient pu être maintenus grâce à ce financement de trésorerie.
o   Une évaluation « macro » utilisant des « modèles » plus généraux de l’économie et centrée sur les exportations, estime que la mesure n’a eu aucun impact sur les exportations. Comme pour les évaluations « macro » des allègements généraux, cette évaluation sur données économiques générales repose fortement sur les hypothèses retenues 1/ de baisse des prix liée à la mesure et 2/ d’élasticité entre baisse des prix et exportations. En l’occurrence, l’hypothèse est faite qu’une baisse du coût salarial de 1 entraîne une augmentation de 0,5 à 0,7 des exportations si la baisse des coûts est totalement répercutée dans les prix. Or, la baisse des coûts de 2013-2014 ayant été répercutée à plus de 70% en augmentations de marges, l’augmentation des exportations attendue (de +ou- 2%) n’est pas vérifiée.
o   Aucune des 3 évaluations n’a donc pour le moment estimé précisément l’effet « trésorerie » du CICE (voir ci-dessus) et l’effet des éventuelles baisses de prix sur la hausse de la demande et les emplois liés. Il est possible également qu’après avoir amélioré leur marge, une partie des entreprises exportatrices (qui ne touchent qu’environ 43% du CICE pour 50% de la masse salariale) diminuent leurs prix et augmentent leurs exportations en 2016 ou 2017. En revanche, ces évaluations n’incluent pas les destructions d’emploi liées aux financements importants du CICE (environ 10 Mds/an de hausses de taxes et 10 Mds/an de réduction de dépenses publiques progressivement entre 2013 et 2017, OFCE CICE ex-ante). En particulier, la seule baisse des dotations aux collectivités ayant eu comme conséquence une réduction de plus de 5 Mds d’euros des investissements locaux (source), le bilan global « net » en termes d’emplois pourra être négatif.

- Diverses aides aux entreprises  soutiennent directement (ex. subventions aux gîtes ruraux ou aux commerces) ou indirectement (ex. construction de zones d’activités) des projets de développement d’activités économiques devant augmenter les emplois dans des lieux ou des secteurs particuliers.
Dispositifs
Avantage ou coût /an
Dépense publique /an
Diverses aides directes et indirectes aux entreprises visent le développement des entreprises et de l’emploi local et sont principalement versées par les collectivités locales (Communes, Intercommunalités, Départements et Régions), notamment via des subventions à l’hébergement touristique, à la construction de zones d’activité économique et au petit commerce, foires et marchés.
+ou- 7 Mds d’aides    (dont ~15% de prêts et avances)
+  2 Mds de coûts de gestion des aides
~ 9 Mds €*
en 2005
(dont ~10% Etat+UE)
*L’estimation du ministère des finances pour les collectivités locales date de 2005, elle est reprise dans le rapport de la Cour des Comptes de 2008 sur les aides économiques des collectivités territoriales avec une estimation des coûts de gestion. Les évolutions de ces dépenses depuis 2005 ne sont pas connues pour une part importante des communes et intercommunalités, mais les données sont disponibles pour les Départements et les Régions en 2011 (Observatoire des finances locales, les finances des collectivités locales en 2013)

Le « système » global des aides directes et indirectes aux entreprises (principalement pour l’hébergement touristique, les zones d’activité et le petit commerce) est régulièrement critiqué, notamment par la Cour des Comptes, comme étant particulièrement complexe et illisible, mais également peu efficace. L’impact global de ces aides aux entreprises est jugé limité pour plusieurs raisons (Cdc 2008 p.43-49) :
o   Le rapport entre le nombre d’entreprises aidées et le nombre total d’entreprises créées ou déjà installées est très limité (1% des entreprises crées et 2% des entreprises installées en 2005) ;
o   Le taux de pérennité à 4 ans des entreprises aidées (sur une région étudiée) est inférieur à celui de la moyenne nationale des entreprises en 2004-2005 (mais l’étude souligne égalemnet un renforcement des entreprises aidées déjà bien ancrées commercialement et un taux de pérennité à 5 ans plus important pour les entreprises ayant bénéficié de montants importants) ;
o   L’absence de corrélation entre les montants des aides accordées et le nombre d’entreprises créées dans la plupart des régions et des zones d’emploi ;
o   Compte tenu de ces indices d’efficacité limités et des montants versés, l’efficience de ces aides est jugée globalement très limitée, d’autant plus que le coût de gestion des aides versées par les collectivités locales est estimé entre 2000 et 2005 à plus ou moins un tiers des sommes versées, soit environ 2 milliards d’euros de coûts de gestion qui s’ajoutent aux 6 milliards d’euros d’aides en 2004 (Cdc 2008 p.66-67) 
o   Par ailleurs, l’efficacité (ou l’efficience) de ces aides est très rarement évaluée par les collectivités locales, y compris par les intercommunalités dont plus des trois-quarts déclaraient ne pas pratiquer l’évaluation en 2009 (AdCF 2010 p.27).
- En particulier, les données nationales sur les zones d’activités économiques n’étant pas suivies, celles-ci sont peu connues, leur recensement et leurs évaluations reposant sur des estimations approximatives et des dires d’expert (AdCF 2010) :
o   Il y aurait entre 25 000 et 30 000 zones (en 2010) pour une superficie équivalente à un département français (soit environ 15% des sols artificialisés et l’équivalent des surfaces bâties) ;
o   La plupart sont des petites zones généralement mal équipées et trop nombreuses, donc en perte d’attractivité et menaçant de devenir des friches ;
o   La multiplication des acteurs et les enjeux financiers importants de ces zones pour les différentes collectivités (notamment en termes de taxe professionnelle, puis de contribution économique territoriale) semblent expliquer cette suroffre et ces échecs ;
o   Certaines implantations en périphérie immédiate des agglomérations sont d’ailleurs à l’origine de conflits entre ces agglomérations et les communautés frontalières profitant ainsi de l’attractivité des agglomérations pour transférer des montants importants de taxe professionnelle (AdCF 2010 p.38).
 - Les contrats « aidés »  permettent des réductions supplémentaires des coûts (salaires, cotisations, tutorat et/ou adaptations de postes) d’emploi de publics en « difficulté d’insertion » dans l’emploi.

Dispositifs
Avantage ou coût /an
Dépense publique /an
Divers contrats aidés* permettent à des associations, collectivités ou entreprises d’employer des publics « prioritaires » (personnes éloignées de l’emploi, salariés handicapés, jeunes sans qualifications…) avec un coût réduit par des subventions à hauteur de 50 à 80% du SMIC brut (qui s’ajoutent à l’allègement général de cotisations de 1 à 1,6 SMIC) :
~12 000 € par ETP (~550 000 ETP)

~ 6,5 Mds €
en 2015 dont :
Le Contrat Unique d’Insertion (CUI) est subventionné à ~80% du SMIC brut sur +ou- 22h/semaine et exonère de cotisations patronales dans le secteur non-marchand (70 à 80% des CUI) ou aide à ~50% du SMIC brut sur +ou- 32h/semaine dans le secteur marchand (20 à 30% des CUI en volume)
~10 000 € par ETP (~250 000 ETP pour ~ 350 000 bénéficiaires)             
~ 2,5 Mds €
(Etat 90% + Dpts)
Les contrats en Etablissement et Service d’Aide par le Travail (ESAT) permettent la prise en charge de +ou- 80% des salaires et cotisations de salariés handicapés (capacité de travail < à 1/3)
~ 20 000 € par ETP
(~120 000)
~ 2,5 Mds €
(Etat, dépense « handicap »)
Les emplois d’avenir profitent depuis 2013 d’une aide globale équivalente aux CUI, mais sont plus longs (plein temps de 28 mois) et visent les 16-25 ans sans qualification
~10 000 € par ETP (~100 000)
~ 1 Md €
(Etat)
Les aides au poste dans les entreprises adaptées sont versées aux entreprises employant plus de 80% de salariés handicapés dans des conditions adaptées à leurs handicaps
~10 000 € par ETP
(~20 000)
~300 M €
(Etat surtout, dépense « handicap »)
Les contrats de génération permettent depuis 2013 aux entreprises de percevoir 4 000 € par an pour chaque recrutement en CDI d’un « jeune » (- de 26 ans) associé au « maintien en emploi » d’un salarié de 57 ans ou plus
~4 000 € par ETP (~50 000)

~ 150 M €
(Etat)
Principale source : PLF Travail et emploi + PLFSS Annexe 5 *Hors contrats en alternance (environ 400 000 en apprentissage et 180 000 en professionnalisation) qui relèvent principalement des politiques de formation initiale (secondaire ou supérieure) et hors ~ 1,3 Md de soutiens spécifiques aux structures de l’Insertion par l’Activité Economique (IAE)

Les contrats aidés « ordinaires » (hors secteurs de l’IAE et du handicap) ont notamment été évalués du point de vue de leur ciblage et de leur efficacité en termes de création d’emploi et/ou d’insertion dans l’emploi des bénéficiaires à la suite de leur contrat aidé. Les principaux constats de ces évaluations sont notamment :
o   Une part relativement importante des bénéficiaires ont des profils peu « éloignés de l’emploi », notamment dans les périodes d’augmentation des volumes de contrats aidés. Par exemple, en 2010, la part d’allocataires de minimas sociaux est passée de 43 à 30% des CUI dans le secteur non marchand et la part de personnes non qualifiées de 28 à 20% (Cour des Comptes 2013). En 2015, la part de demandeurs d’emploi depuis moins d’1 an dans les CUI reste élevée (à 30%), mais la part des personnes non qualifiées (sans diplôme autre que le brevet des collèges) dans les CUI non marchands s’est rétablie à 26% alors que les demandeurs d’emploi depuis plus de 2 ans représentent tout de même 41% de ces bénéficiaires (Dares 2017) ;
o   Les effets d’aubaine sont plutôt limités pour les contrats aidés des secteurs non marchands (de 60 à 70% des embauches n’auraient pas eu lieu sans l’aide, soit 30 à 40% d’effet d’aubaine « pur » ou de simple anticipation selon les secteurs, voir tableau ci-dessous), mais plutôt très élevés pour les employeurs des secteurs marchands (seulement 10 à 20% des embauches n’auraient pas eu lieu sans l’aide selon les secteurs). En effet, les besoins de main d’œuvre du secteur non marchand sont souvent importants mais non ou sous-financés, alors que les employeurs du secteur privé ont des besoins d’embauche principalement en période de hausse de leurs recettes et profitent de cette aide pour augmenter leurs marges. Ces estimations utilisent principalement des enquêtes auprès d’employeurs, en France (Dares 2015 + Dares 2017) ou à l’étranger (ex. Suède dans Effets macro CUI 2012). Des méthodes macro ou micro-économiques sont également utilisées, comme pour l’évaluation des primes à l’embauche (dont les effets d’aubaine ou de simple anticipation sont le plus souvent estimés entre 80 et 90%, Aides à l’embauche Trésor-Eco 2016). A noter que ces estimations basées sur le lien entre coût du travail et demande de travail ont des résultats assez proches de ceux des enquêtes auprès des employeurs (+ou- 0,7 emplois supplémentaires pour 1 emploi aidé dans le secteur non marchand vs. +ou- 0,15 emplois supplémentaires seulement dans le secteur marchand).


o   L’efficacité de ces contrats aidés en termes d’insertion ultérieure dans l’emploi de leurs bénéficiaires est plus forte pour les contrats aidés du secteur marchand. Par exemple, en 2010, ~ 70% sont en emploi 6 mois après vs. ~ 40% pour les sortants des secteurs non marchands. En 2014, les différences de « taux de retour à l’emploi » sont quasiment identiques selon les types de secteurs (Dares 2017), mais les profils de ces bénéficiaires sont toujours fortement différenciés dont peu comparables. En comparant les trajectoires de ces bénéficiaires à des personnes au profil « équivalent » (âge, qualification…) mais n’ayant pas bénéficié de contrats aidés en 2005, les bénéficiaires du secteur marchand ont 1,3 fois plus de chance d’être en CDI  2 ans après leur contrat aidé que les personnes au profil « équivalent ». En revanche, les bénéficiaires du secteur non marchand sont légèrement moins en emploi que les personnes non bénéficiaires au profil équivalent, sauf lorsque le contrat aidé a duré plus d’1 an (Cour des comptes 2013). Ces différences sont généralement expliquées par la plus forte proximité des emplois occupés avec les emplois « non subventionnés » plus fréquemment disponibles, alors que les secteurs non marchands ont très peu recruté sur la période.
o   Pour autant, ces comparaisons de « taux d’emploi » à l’issu ou quelques mois ou années après les contrats (entre dispositifs et/ou avec des personnes n’ayant pas bénéficié de contrat aidé) sont fortement biaisées par les différences « non quantifiées » de profils recrutés (les associations et collectivités recrutant plus fréquemment des personnes moins « employables » du point de vue de leurs expériences précédentes, de leur « productivité » ou « savoir-être ») et de « canaux » de recrutement : les recrutements des bénéficiaires de contrats aidés du secteur marchand sont souvent réalisés par des employeurs les « connaissant déjà avant » (~ 45% vs. moins de 30% dans les secteurs non marchand), ce qui peut expliquer leur taux d’insertion à 2 ans supérieur à celui des bénéficiaires du secteur non marchand et des personnes non bénéficiaires au profil « administratif » équivalent (Dares 2017). Enfin, l’insertion des contrats aidés dans le secteur non-marchand pourrait être nettement supérieure en période de recrutement dans le secteur public et/ou associatif, ce qui n’est pas le cas depuis plus de 10 ans.
Allocations et accompagnements des demandeurs d’emploi
- Les allocations des demandeurs d’emploi  indemnisent les demandeurs d’emploi (pour la plupart), selon trois ensembles de modalités :
o   avec des durées et taux principalement basés sur leur activité de l’année précédente pour les demandeurs d’emploi ayant perdu leur emploi après avoir été salariés + de 610 heures dans les 28 derniers mois (ARE) ou durant 1 an après un licenciement économique (ASP) ;
o   avec un revenu minimum sans lien avec les revenus d’activité précédents pour les demandeurs d’emploi dont les ressources sont limitées et n’ayant plus de droits aux allocations chômage en raison d’une durée trop importante (ASS) ;
o   ou n’ayant pas de droit en raison d’un activité salarié insuffisante pour obtenir des droits à une « allocation chômage » (RSA « socle »)

Dispositifs
Avantage ou coût /an
Dépense publique /an
Les allocations liées à l’assurance chômage indemnisent les demandeurs d’emploi ayant perdu leur emploi après avoir été salariés + de 610 heures (l’équivalent de 4 mois à plein temps) dans les 28 derniers mois avec des durées et taux principalement basés sur leur activité de l’année précédente :
-       L’Allocation de Retour à l’Emploi (ARE) est de 65 à 95% des 12 derniers revenus salariaux mensuels nets avec un plafond à 6250 €/mois, elle n’est plus perçue à partir d’une activité réduite de plus de 110h/mois et après 24 mois.
-       L’Allocation de Solidarité Spécifique (ASS) est versée par l’Etat aux demandeurs d’emploi dont les droits à l’ARE sont épuisés et qui ont plus de 5 ans d’activité salariée au cours des 10 ans (et dont les ressources sont < à 1100 seul ou 1700 en couple)
-       L’Allocation de Sécurisation Professionnelle (ASP) est versée aux licenciés économiques des entreprises de - de 1000 salariés à un niveau supérieur à l’ARE les 12 premiers mois (maintien du salaire net) et rend prioritaire pour les formations
-       L’Aide à la Reprise ou Création d’Entreprise (ARCE) permet de recevoir la moitié de ses allocations chômage en 2 versements espacés de 6 mois en cas de projet de création ou reprise (elle est généralement cumulée avec l’exonération de cotisations ACCRE)



+ou- 1000 € net/mois
(~2,9 M)

~ 450 € net/mois
(~450 000)

+ou- 1200 net/mois
(~80 000)

+ou- 11 000 €
en 2 versements
(~50 000)
~ 37 Mds €
en 2015 dont :
~ 3 Mds € de gestion

~ 29 Mds € d’ARE
(Unedic)

~ 2,5 Mds € d’ASS
(Etat)

~ 1,5 Mds € d’ASP
(Unedic + Etat)

~ 600 M € d’ARCE
(Unedic)

Le Revenu de Solidarité Active (RSA) « socle » est versé aux personnes de plus de 25 ans dont les revenus sont inférieurs à un minimum (variable selon la composition du foyer et l'existence de revenus d'activité) sans revenu d’activité disposant de moins de 500 €/mois seul ou 750 €/mois en couple (+ 150 à 200 €/enfant) d’atteindre ce revenu « minimum » mais pas au-delà (les autres ressources perçues sont déduites, hors une part variable des aides au logement

+ou- 400 € net/mois
(2 M dont 900 000 sont des demandeurs d’emploi non indemnisés)

~ 10 Mds €
en 2015

La Prime d’activité remplace depuis 2016 la Prime Pour l’Emploi (crédit d’impôt) et le RSA activité (allocation) en complétant les revenus d’activité limités Salariés ou indépendants ayant des revenus d’activité réduits (ex.1500 euros net par mois pour une personne seule)
+ou- 200 € net/mois
(jusqu’à 500 € net/mois « seul » -38% des revenus)
~ 5 Mds €
en 2016
~ 3 M bénéficiaires
(dont x% en activité réduite)
Principales sources : PLF Solidarité et insertion + Rapport Unedic + Aide et action sociale Drees + Cour des comptes 2015 (pour les répartitions des dépenses de Pôle Emploi)
Globalement, les soutiens financiers aux demandeurs d’emploi permettent une forte réduction des situations d’extrême pauvreté, notamment s’agissant du RSA socle et de l’ASS (qui concernent plus de 2,5 millions de ménages). L’assurance-chômage permet davantage de réduire le taux de pauvreté « monétaire » qui est supérieur aux minimas du RSA ou de l’ASS (environ 1000 euros par mois pour une personne seule). Pour autant, le taux de pauvreté des demandeurs d’emploi reste supérieur à 35% (CNLE), notamment en raison de modalités d’indemnisation qui ne couvrent que les personnes ayant suffisamment cotisé dans la dernière période et qui favorisent les parcours les plus stables et bien rémunérés (Cour des Comptes 2013, p.46-68). Au-delà de cet impact social important, ces soutiens ont des limites importantes en termes de taux de « non recours » (surtout pour le RSA, ce qui limite son impact social), des effets limités sur l’incitation à la reprise d’emploi (pour le RSA et les allocations chômage) et des impacts négatifs sur la forte augmentation actuelle du recours aux contrats très courts par certains secteurs et entreprises :
o   Des études assez anciennes soulignent notamment le taux important de non recours au RSA en général et au RSA activité en particulier. Fin 2010, le taux de non recours pour le RSA socle était estimé à 35 % contre 68 % pour le RSA activité. Les montants mensuels non perçus sont de l’ordre de 408 € pour le RSA socle et 134 € pour le RSA activité. La première raison de ces non recours était l’absence de connaissance de ces droits, en particulier pour le RSA activité (assez récent à l’époque). A ce défaut de connaissance de ces aides et des modalités pour y accéder s’ajoute, pour le RSA activité, des montants plutôt limités au regard des coûts associés aux démarches à effectuer et, plus généralement, des stigmatisations sociales associées au RSA ;
o   Pour ceux ayant recours aux allocations, la durée des allocations chômage aurait un impact négatif sur la reprise d’emploi. Une évaluation a notamment été réalisée sur les trajectoires d’allocataires de 2 anciennes « filières » de l’assurance chômage entre 2000 et 2002. Un seuil de 8 mois de travail dans l’année précédente impliquait alors 7 mois d’assurance (pour ceux ayant travaillé moins de 8 mois) ou 15 mois d’assurance (pour ceux ayant dépassé 8 mois) :
·         Les profils d’allocataires étant assez proches autour de ce seuil de 8 mois (7 à 8 mois vs. 8 à 9 mois), la comparaison de leur trajectoire permet de mieux « isoler » l’effet de la durée d’allocation sur la rapidité du  retour à l’emploi. En l’occurrence, cette différence s’est révélée assez forte (12,5 mois vs. 10 mois pour sortir de l’assurance chômage), soit deux fois plus que sur des études de même type réalisée en Autriche ou au Portugal. Ces reprises d’emploi étant pour des contrats dont les durées sont en moyenne similaires, l’évaluation conclue à un effet d’accélération sans réduction de la qualité de l’emploi ;
·         Pour autant, cette étude reste peu extrapolable à l’ensemble de la population (le profil des allocataires concernés étant assez spécifiques : jeunes peu qualifiés avec des contrats instables pour la plupart) et à d’autres périodes (2000-2002 étant en forte croissance). De plus, une même durée moyenne des contrats ne permet pas de conclure à une qualité d’emploi identique dans la mesure où les demandeurs ayant davantage de temps pour rechercher ont peut-être attendu des emplois ayant de meilleures horaires, perspectives, contenu ou autres avantages... Surtout, l’étude ne souligne pas que l’effet du seuil de 8 mois implique une moyenne de 3 mois sans assurance pour les demandeurs d’emploi de la 1ère filière, alors que ceux de la 2nde sortent du chômage 2,5 mois avant la fin de leurs droits.
  • Par ailleurs, les règles de l’assurance chômage ont un impact négatif sur la très forte augmentation du recours au CDD courts (+ 120% de CDD de moins d’1 mois vs. une stagnation des CDI et CDD > 6 mois depuis 2000, voir graphique politiques de l’emploi). En effet, ce dispositif donne la possibilité de cumuler allocation chômage et revenu d’activité à un niveau élevé et sur de longues périodes. Surtout, le calcul du salaire de référence sur la base du salaire par jour travaillé (et non sur la base du salaire moyen sur une période donnée) rend 2 fois plus rentable pour un salarié de fractionner des contrats de travail à temps plein plutôt que d’être employé continûment à temps partiel. Plus des 2/3 des salariés ayant des contrats d’une durée < à 1 mois sont ainsi inscrits en tant que demandeur d’emploi contre moins de 17% en 1990, alors que les règles de cumul étaient nettement plus limitées à l’époque. Pour les employeurs ayant recours de manière croissante à ces contrats très courts (notamment avec la diffusion des CDD d’usage et saisonniers qui n’ont pas de contraintes ni primes), le coût des périodes avec moins d’activité est ainsi transféré à l’assurance chômage (CAE 2015), sans avoir à payer les suppléments des heures supplémentaires en cas de hausse d’activité.
  • En effet, le contexte économique (tertiarisation de l’économie, flexibilisation des horaires de travail, fonctionnements à flux-tendus, etc)  n’est pas suffisant pour expliquer l’augmentation de l’usage de contrats courts (qui permettent à l’employeur de s’ajuster à la demande par de l’emploi de courte durée et de réaliser des économies pendant les périodes d’inter-contrats, tout en limitant les surcoûts liés au recrutement, grâce au recours massif à la réembauche), dans la mesure où ce phénomène de hausse des contrats très courts ne s’observe pas partout : aux Etats-Unis par exemple, les tendances sont au recul des embauches pour une durée de moins d’un trimestre. La France se démarque de fait de ses homologues européens par un usage important des contrats courts : en 2011, 35% des salariés en CDD en France avaient des contrats de moins de trois mois, contre 19% en Italie et 4% en Allemagne (CAE 2015).


[1] A noter que l’évaluation du coût des exonérations de cotisations patronales est réalisée à partir des « taux de droit commun » et non du taux « effectif » payé qui inclut l’allègement général de cotisations patronales sur les bas salaires. La plupart des emplois concernés par cette exonération étant rémunérés à proximité du SMIC, son coût effectif est donc probablement très inférieur s’agissant des cotisations patronales (Cf. « politiques de l’emploi » ci-dessus).
[2] Cité dans de le rapport du CESE sur les politiques de développement et d’aménagement du territoire de 1998 (pp.149)
[3] Selon les estimations de ce rapport, les financements publics de l’IAE ont mobilisé en 2011 entre 1 et 1,3 Md€, auxquels s’ajoutent plus de 200 M€ d’exonérations sociales.

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